biographie : Paul Bouchet

BOIUCHET COMITE AG LYON

Comité de l’AG de Lyon en 1946. Paul Bouchet au premier rang, troisième en partant de la droite.

(Actualisation: décès 25 mars 2019. Voir communiqués et hommages du Germe et de la Cité des mémoires étudiantes sur notre site).

Né le 2 août 1924 à Saint Etienne, son père est employé à la Manufrance d’Etat et sa mère s’occupe des trois enfants. Paul Bouchet se trouve au moment de la débâcle, en juin 1940, à Lyon, puis après Noël à Panissières (Loire) où son père est muté. Là, il s’engage dans la Résistance, expérience fondatrice, alliant des individus de tous horizons sur des objectifs communs et concrets d’émancipation, ce que Paul Bouchet va à chaque fois tenter de renouveler : « ça a toujours été le rêve de ma vie, c’est de regrouper les jeunes ouvriers, les jeunes paysans et les jeunes intellectuels » (entretien avec l’auteur, 1995).
Après la Libération, il s’inscrit à la faculté de droit de Lyon en 1945, et devient président de l’Association générale des étudiants de Lyon. Participant avec Miguet à la commission d’études syndicales de l’association, il est le rédacteur d’un texte adopté au congrès de Grenoble de l’UNEF d’avril 1946, texte qui devient par la suite un texte de référence du syndicalisme étudiant, dit «Charte de Grenoble». Désigné par le conseil d’administration de l’UNEF en janvier 1946, il est membre de la délégation française à l’Union internationale des étudiants, participant au «Comité préparatoire international» du congrès de l’UIE (Prague, novembre 1946). Il participe également à l’Entr’aide universitaire internationale dont les tâches dans l’après-guerre sont énormes. Aux débuts de la guerre froide, il tente avec l’UNEF d’éviter la scission internationale du mouvement étudiant refusant tout autant les diktats soviétiques que la formation d’une internationale strictement occidentale (voir témoignages in Cahiers du Germe, N° 1, «spécial Charte de Grenoble», 1996, et N° 2 «spécial internationales étudiantes», 1997).
Il n’est membre d’aucune organisation politique, ni même – contrairement à ce qui a pu être dit – de la JEC, même si l’influence d’un christianisme social incarné par Témoignage Chrétien est incontestable. Porté par sa formation et l’expérience de la Résistance au rassemblement, on pourrait le rapprocher du syndicalisme révolutionnaire. Il n’est pas contre les partis mais, comme beaucoup de gens de sa génération,  au parlementarisme style IIIe République, il préfère le rassemblement de tous dans l’action. Il utilise la formule d’ «apartitisme», pour s’opposer à «l’apolitisme» officiel de l’UNEF comme à l’inféodation partisane. Pour lui, le syndicalisme étudiant prépare au (et est partie prenante du) syndicalisme professionnel, ce qu’il développe dans Lyon Etudiant en 1946. Bouchet est capable aussi bien de penser l’action directe (occupation des cinémas qui refusent de pratiquer des tarifs étudiants) que la gestion directe étudiante des réalisations, dont le restaurant lyonnais sera un symbole. A la fin de ses études, tout en embrassant la profession d’avocat dans sa ville de Lyon, il continue à siéger comme conseiller juridique de l’UNEF auprès de son conseil d’administration jusqu’en 1952. Pour les syndicalistes étudiants des générations suivantes, il demeure une référence.
Anti-colonialiste, comme avocat, il s’engage dans la défense des militants algériens. Elu bâtonnier du barreau de Lyon de 1982 à 1984, il devient membre du Conseil d’Etat en juillet 1985. Il est l’artisan du remplacement du système «d’assistance juridique» en un droit pour les justiciables, «l’aide juridictionnelle», il en préside d’ailleurs le Conseil national de l’aide juridique de janvier 1993, et ce pour trois ans. De 1991 à 1997 il est également président de la «Commission de contrôle des interceptions de sécurité», c’est à dire chargé du contrôle des écoutes téléphoniques.
Son activité en faveur des plus précaires et des plus pauvres est un combat social qu’il mène dans diverses arènes. Il préside le FAS (Fonds d’aide sociale pour les travailleurs immigrés) de 1983 à 1986, devient en 1989 membre et président de la Commission consultative des droits de l’homme jusqu’en avril 1996. Après son départ de la présidence de la CCDH, il s’engage dans ATD Quart-monde et il succède à Geneviève Anthonioz – De Gaulle en 1998, présidence qu’il quitte en 2004 sans cesser son activité, puisqu’il a continué à sièger au Haut comité pour le logement des personnes défavorisées et au Haut conseil de la coopération internationale.
Dans divers conflits, il est désigné comme médiateur : 1981 aux Minguettes, 1981 à la prison de Bois d’Arcy, 1986, enfants des couples mixtes franco-algériens, 1989, Chantiers de l’Atlantique à Saint Nazaire. En 1996 encore, s’engage auprès des étrangers sans-papiers de «Saint-Bernard» en tant que médiateur.
Le titre de son témoignage, «Mes sept utopies», résume bien sa fidélité  à son engagement ininterrompu en faveur de l’émancipation sociale et des droits de l’homme.

Ecoutez son témoignage.

Inventaire du fonds Paul Bouchet (Cité des mémoires étudiantes, déposé aux AN)

Robi Morder

Cahiers du Germe n° 25 – 2005.

Print Friendly, PDF & Email
(Comments are closed)