lecture : Tristan Poullaouec, Le diplôme, arme des faibles : les familles ouvrières et l’école

Tristan Poullaouec, Le diplôme, arme des faibles : les familles ouvrières et l’école. L’Atelier, 2010.  Prenant le contre-pied de la thèse du pari perdu de la massification, laquelle serait une sorte « d’abus de confiance » et d’une tromperie vis-à-vis des jeunes des classes populaires quant à la possibilité de « bonnes » études supérieures, l’auteur s’appuie sur des enquêtes sociologiques et statistiques. En comparant les parcours de plusieurs générations d’enfants et de familles ouvrières au cours des cinquante dernières années, de leurs attentes, discours, et des résultats, Tristan Poullaouec montre et démontre. Il montre d’abord l’augmentation du suivi de la scolarité des enfants d’ouvriers par leurs familles qui les rapproche de plus en plus des pratiques familiales des cadres. Non, les parents « n’ont pas démissionné ». La transformation des mondes ouvriers, et notamment la scolarisation plus importante de générations qui à leur tour deviennent parents et sont à même de suivre plus longtemps les études de leurs enfants en est un élément clé… résultat justement de cette massification, tout en décrivant les formes populaires de ce suivi scolaire. En comparant les parcours scolaires « toutes choses égales par ailleurs » entre enfants issus de classes sociales différentes, il confirme le poids des inégalités culturelles et sociales à la base des échecs scolaires, et notamment l’importance de l’enseignement primaire où tout se joue.

Certes, la massification et la démocratisation ne sont pas synonymes, la sélection sociale demeure mais sous une forme différente, différée et dans ce nouveau délai accèdent à des diplômes de nombreux enfants des couches populaires qui, auparavant, n’auraient pu imaginer « aller jusque là ». Les avancées constatées dans les conditions présentes permettent d’envisager ce qui pourrait se développer dans de meilleures conditions si l’enseignement recevait des pouvoirs publics

Robi Morder

Les Cahiers du Germe n° 29, 2010/2011