lecture: Roger Barralis et Jean-Claude Gillet (coord). Au cœur des luttes des années soixante, les étudiants du PSU

Roger Barralis et Jean-Claude Gillet (coord). Au cœur des luttes des années soixante, les étudiants du PSU, Publisud, 2010. C’est en 2008, à l’occasion d’une rencontre d’anciens du PSU lors d’une des initiatives commémorant le quarantième anniversaire de Mai 1968, que l’idée d’écrire un ouvrage sur les étudiants du PSU est devenue résolution.

Jacques Sauvageot, ancien Président de l’UNEF en 1968 et un des animateurs de Mai 68, a réalisé l’introduction de cet ouvrage rédigé par une vingtaine d’auteurs et coordonné par Jean-Claude Gillet et Roger Barralis deux anciens responsables de l’UNEF et des étudiants du PSU (ESU) au cours des années 1960.

Fruit d’un travail collectif, cet ouvrage marque la volonté des anciens étudiants du PSU d’écrire leur part de mémoire, en réaction à l’occultation fréquente par les médias du rôle du PSU et des ESU dans les luttes politiques des années 1960 et spécialement en mai 68. Ils estiment rester fidèles à leurs idéaux de jeunesse, car ils croient toujours « qu’un autre monde est possible »!  Publié l’année du cinquantième anniversaire de la création du Parti Socialiste Unifié ( PSU ), ce livre est pour ses rédacteurs un rappel que ce parti, disparu depuis 20 ans, « a joué un rôle essentiel dans le renouveau du socialisme en France ».

Ouvrage collectif, réunissant de nombreux témoignages, il a été préparé lors de nombreuses réunions entre les acteurs de l’époque tenues à la mairie du troisième arrondissement et est construit en trois chapitres : « les années contrastées » (1962-1964), « reconstruire : définir une stratégie » (fin 1964 à fin 1966), « la montée des luttes » (1967- Mai 1968), la « tourmente de l’après-mai » (jusqu’en 1971), avec de nombreux encadrés, regards sur des militants, des documents, des évènements ; Nous laissons aux lecteurs le soin de prendre connaissance des témoignages, mais nous permettrons quelques remarques.

Tout d’abord, il est heureux que cet ouvrage, qui est concomitant avec des travaux de recherche (colloques et publications), rappelle une organisation disparue. Le risque est toujours grand, bien réel, que les organisations disparues disparaissent aussi de l’histoire, du moins de celle accessible à un assez large public. Les journalistes ont beaucoup évoqué dans les commémorations de 1968 les trotskystes, les anarchistes, (dont des organisations qui s’en réclament subsistent et même avec force) les maoïstes (leurs partis ont disparu, mais la Chine demeure avec ses références à Mao), mais quasiment rien sur le PSU. L’UEC comme l’UNEF peuvent tenir colloques et réunions sur leur passé, l’enjeu mémoriel est important pour leurs militants qui peuvent ainsi en relater une continuité, même si cela est parfois discutable sur le plan scientifique. Le choix des anciens étudiants du PSU pour ce livre est pourtant à mi-chemin entre histoire et mémoire : il ne se prétend pas œuvre scientifique, ce qui ne lui ête aucune qualité, il apporte de nombreux matériaux, témoignages notamment, pour la recherche. Il est aussi une œuvre militante, quasiment générationnelle. En effet, ce n’est pas toute l’histoire des étudiants du PSU (rappelons que le PSU existe avant 1962 et après 1971), mais plutôt des étudiants PSU/UNEF. La distinction, surtout après la « prise du pouvoir » dans l’UNEF en 1967 jusqu’à 1971, entre les deux aspects étroitement imbriqués est encore plus difficile à faire que pour les militants de l’UEC oppositionnelle et « italienne » dans les années 1963/1965. L’hypothèse de continuité, vérifiée pour les « PSUNEF » (j’invente ici) de la décennie le serait-elle si on étendait à l’ensemble du quart de siècle du PSU en milieu étudiant ? Ce serait une piste à explorer. En attendant d’approfondir sur le PSU et les mouvements étudiants – notamment le MARC et le MAS – des années 1970, les débats organisés autour du présent ouvrage permettent de continuer un travail de confrontation entre et avec les acteurs, les témoins, les documents, ce dont les chercheurs qui doivent le susciter ne peuvent que se réjouir.

Robi Morder

Les Cahiers du gERMEn° 29, 2010/2011

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