biographie: Jean-Marie Lustiger

LUSTIGER Jean-Marie (1926-2007). Jean Marie Lustiger est décédé le 5 août 2007 à Paris.  Ayant joué un rôle dans le mouvement étudiant, nous nous bornerons donc dans cette notice à – quasiment – cet unique aspect, sans retracer l’ensemble de sa vie. Aaron (de son premier prénom) Lustiger naît  en 1926 dans le douzième arrondissement de Paris, de parents juifs provenant de la frontière Pologne/Silesie ayant immigré à Paris vers 1918. Ils ont également une fille, et ils tiennent un magasin de bonneterie dans le dix-huitième arrondissement et n’ont pas de pratique religieuse.  Il suit des études secondaires au lycée Montaigne, au Quartier Latin. Après un premier exode à Orléans il se convertit au christianisme 1940. Sa mère est déportée (dénoncée comme juive par un voisin). Après son bac en 1943, il passe clandestinement la ligne démarcation pour rejoindre père son à Decazeville, puis à Toulouse au printemps 1944 où il est intégré dans un groupe de jeunes résistants proche de Témoignage Chrétien.

Dans Le choix de Dieu (1987, Ed. De Fallois), il explique qu’il n’a « accédé au raisonnement politique » qu’à partir de cette période, alors qu’à Toulouse « les communistes faisaient la loi ». Dans ce contexte il épouse la thèse démocrate chrétienne de la réconciliation de la République et de l’Eglise. Revenu à Paris avec son père à l’automne il s’inscrit en Sorbonne. Il distingue Saint Germain des Près qui « n’est plus le quartier latin ». Après la « frontière de la rue de Tournon », c’est un « autre monde » (zozos, existentialistes). Il suit deux ans en lettres classiques, puis deux années à l’Institut catholique en faculté de philosophie, enfin reprend des cours de philo pendant un an en Sorbonne.

Se consacrant à l’action religieuse en milieu étudiant, son premier souci est de trouver l’aumônier de la section JEC Sorbonne, qui était Jean Danielou. Il s’agit de répondre à la vocation chrétienne par une action de type socio-politique, passant par un investissement dans le syndicalisme étudiant. Jean-Marie Lustiger s’inscrit au groupe d’études littéraires classique, devient président du GEA (groupe d’études antiques) pendant un an, puis préside la FGEL. L’abbé Charles tentant d’unifier tous les groupes catholiques, il joue un rôle éminent au nouveau « centre Richelieu » ouvert tant aux étudiants de lettres que de sciences. Expliquant qu’il n’est pas tenté par le communisme, il souligne qu’en 1948/1949 la véritable question à poser aux « chrétiens progressistes » était : s’ils ont raison, il faut adhérer au PCF, mais en tous cas, ne pas rester à mi chemin. Il fait son service militaire en 1950 en Allemagne pour les classes, puis comme EOR à Saint Maicent.

Jean-Marie Lustiger est un des délégués de Paris lettres au congrès de Grenoble en 1946. Paul Bouchet se souvient de lui votant la Charte. (Ils se sont retrouvés dans les années 1990  à la commission nationale consultative des droits de l’homme dont ils étaient membres tous deux, Paul Bouchet la présidant). Le compte-rendu du congrès (cf : Naissance d’un syndicalisme étudiant, 2006, Ed Syllepse) nous apprend qu’au moment de voter la présidence d’honneur à Emmanuel Villedieu (unanimité moins trois contre et trois abstentions), désignation dénoncée par les Lyonnais et particulièrement par Paul Bouchet, les lettres Paris s’abstiennent. René Rémond, dans la table ronde du colloque « Les facs sous Vichy », publiée dans le volume éponyme en 1994 sous la direction d’André Gueslin, aux publications de l’institut d’études du Massif Central en 1994, indique de manière erronée qu’ « au congrès de Grenoble, le représentant de la JEC qui a fait adopter l’article définissant l’étudiant comme un jeune travailleur salarié n’était autre que l’actuel archevêque de Paris » (p. 355). Bien évidemment, il s’agit d’une transformation du rôle de la JEC et de Jean-Marie Lustiger qui correspond au désir de l’orateur plus qu’à la réalité, mais sans notes et à 50 ans de distance, c’est un des raccourcis que l’on connaissait à René Rémond et dont on peut ne pas lui tenir rigueur.

Jean-Marie Lustiger était membre de l’association des anciens de l’UNEF, a participé à quelques unes de ses réunions – ce fut à l’occasion d’une de ces assemblées que je l’avais rencontré en 1993. Il avait ainsi pu prendre connaissance de l’existence des archives de l’UNEF à la BDIC et du projet qui allait aboutir à la création du GERME.

Robi Morder

Cahiers du Germe n° 27 –  2008.

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