Étudiantes et étudiants dans la nouvelle période du Maitron : 1968-1981

affichejournee2021defsmallCes 30 novembre et 1er décembre se tiennent au Campus Condorcet les journées Maitron (programme), sur le thème de la jeunesse, ce qui inclut bien entendu les étudiantes et étudiants. Nous interviendrons, par la voix de Ioanna Kasapi, le 30 après-midi pour en traiter. Dans la série 1940-1968, le militantisme étudiant était étroitement associé au syndicalisme étudiant , à savoir l’UNEF, unique organisation représentative, ou se situaient l’ensemble des étudiants affiliés aux courants et partis politiques de gauche, aux mouvements confessionnels qui connaissent une orientation progressiste. La scission de la FNEF (Fédération nationale des étudiants de France), en 1961 si elle met fin à l’exception unitaire que constituait le syndicalisme étudiant, n’a pas d’incidence sur la prosopographie du mouvement social, la FNEF se situant à droite de l’échiquier politique, malgré la présence dans ses rangs d’étudiants socialistes qui, sous couvert d’apolitisme, s’arrange du maintien de la présence coloniale française en Algérie.La période 1968-1981 se présente différemment. 

L’après 1968 change la donne. Bien qu’affaiblie par les coups portés par le pouvoir gaulliste que par ses divisions internes, l’UNEF de mai et juin 1968 demeure une référence commune. Mais très vite le cadre unitaire va s’effilocher et éclater. Divisée quant à la tactique face à la loi Faure (novembre 1968) qui instaure une représentation élue des étudiants dans les universités, en décembre 1968 le congrès de Marseille voit le départ des trotskystes de « rouge » (future Ligue communiste) et de nombre de militants des comités d’action nés au printemps 1968. Le bureau national composé de membres du PSU cohabite avec deux minorités, l’une animée par les étudiants du PCF et de l’UEC, le courant – ou tendance – « renouveau », l’autre par les trotskystes « lambertistes » de l’AJS constituant la tendance « unité syndicale ». Quand le PSU décide d’abandonner l’UNEF, aucun des deux courants restants n’acceptant d’être minoritaires par rapport à l’autre, la scission a lieu ce qui se matérialise par deux congrès séparés et l’existence de deux organisations revendiquant le sigle UNEF, l’UNEF dite renouveau continuant a porter le nom d’UNEF, à côté d’une UNEF unité syndicale.

Dans cette situation, une bonne partie de la vie militantes étudiante va se dérouler hors du syndicalisme étudiant « unefien ». C’est dans ce contexte que le système de coordination de délégués d’assemblées générales s’impose dans le répertoire d’action collective comme outil de représentation pendant les luttes généralisées (DEUG et Loi Debré au printemps 1973, grève générale contre la réforme du deuxième cycle au printemps 1976). Ces coordinations, si elles intègrent les syndicalistes étudiants, sont essentiellement animées par les courants politiques de l’extrême-gauche, notamment LC puis LCR, « Révolution » devenue OCT (organisation communiste des travailleurs), libertaires, membres de l’AMR (l’Alliance marxiste-révolutionnaire), « inorganisés » (en réalité sans-parti dont des étudiants de la JEC, (Jeunesse étudiante chrétienne). Des comités de lutte se maintiennent parfois un moment au-delà des grèves, tentent de se fédérer (tentative de la FNCL (fédération nationale des comités de lutte) en 1972, courant des « CA/CL » (comités d’action/comités de lutte) en 1976.

1976 semble marquer un tournant qui clôt, dans le mouvement étudiant, les années 1968, avec le retour au premier plan du militantisme étudiant des questions universitaires, un renforcement du syndicalisme que ce soit dans les structures existantes (les deux UNEF) ou dans un nouveau syndicat, le MAS (Mouvement d’action syndicale) fondé en 1976 et qui est le vecteur de la resyndicalisation des courants politiques qui avaient quitté le syndicalisme étudiant, PSU, LCR, et d’étudiants socialistes (« rocardiens »), tandis que d’autres étudiants socialistes (« mitterandistes ») lancent un éphémère COSEF (Comité d’organisation pour un syndicat des étudiants de France) s’appuyant particulièrement sur la MNEF (Mutuelle nationale des étudiants de France), le COSEF intégrant l’UNEF-US en y constituant une tendance socialiste).

L’UNEF-US et le MAS fusionnent en 1980 pour donner naissance à l’UNEF-ID (Unef indépendante et démocratique).

Nous allons avoir à faire avec des biographies de nombreux militants cumulant au même moment des responsabilités syndicales, ou mouvementistes, et des responsabilités politiques en tant que militants ou dirigeants des « secteurs étudiants » de leurs organisations politiques plus encore que dans la période précédente.

Nous allons donc avoir à établir – ce qui a commencé à être fait – une liste de membres des directions nationales des organisations syndicales étudiantes et de la MNEF, des membres des collectifs ou bureaux des coordinations lors des grandes grèves, et des secrétariats ou directions des secteurs étudiants d’organisations politiques. Les itinéraires militants ne s’arrêtant pas avec les études, nombre de ces personnes vont connaître des carrières politiques, syndicales, associatives et être impliquées, pendant comme après leurs études, dans ce qu’on appelle à l’époque de « nouveaux mouvements sociaux » : féminisme et groupes femmes, contestations de l’armée, comme autour des solidarités internationalistes, du soutien aux luttes des immigrés, des jeunes travailleurs.

La féminisation des universités a été déjà très importante même dans les années 1950. De plus, durant cette période post-68 les luttes et les mouvements féministes ont fleuri. Pour enrichir notre corpus donc nous allons naturellement s’intéresser également aux étudiantes- militantes ayant exercé des responsabilités au seins des ces syndicats.

Notre champ s’étend à la jeunesse scolarisée du secondaire qui avec mai et juin 1968, connaît un « passage de la dépendance à l’autonomie » avec les CAL (comités d’action lycéen) s’émancipant de la tutelle étudiante, « inventant » la coordination lors de l’affaire Guiot (février 1971), et l’émergence à partir de 1973 notamment d’un mouvement spécifique des élèves du technique qui sera investi d’abord par LO (Lutte ouvrière) au travers de « Ceux du technique », puis par la CGT avec le lancement d’un syndicat particulier, la CP-CET (Coordination permanente des CET), qui va inspirer également les militants des CCA (Comités communistes pour l’autogestion) pour la création du syndicat lycéen CPL (VCordination permanente des lycéens) en 1979.

Côté étudiant-es : Unef 68 71, UNEF dite renouveau, Unef us, MARC puis MAS, COSEF, Unef id, FNCL, CA/CL coordinations nationales…

Côté lycéen : CAL (Comités d’action lycéens), UNCAL (Union nationale des CAL), Comités de lutte, CP-CET (Coordination permanente des Collèges d’enseignement technique), CPL (Coordination permanente lycéenne), coordinations…

Forces politiques et autres : PCF/UEC et UJCF, PSU, AJS/OCI, LC/LCR, AMR/CCA, Révolution/OCT, LO, JEC, JOC

Ioanna Kasapi & Robi Morder

Print Friendly, PDF & Email
(Comments are closed)