lecture : Yohanna Talopp, Student representation : a study of student unions and the National Union of Students of the United Kingdom

Yohanna TALOPP, Student representation : a study of student unions and the National Union of Students of the United Kingdom,  Maîtrise, Université Paris III – Sorbonne Nouvelle, 2002, 122 p. (sous la dir. de M. Charlot). L’ambition principale de cette étude, réalisée à l’Université d’Oxford Brookes grâce à l’échange ERASMUS, est d’analyser la représentation étudiante au Royaume-Uni. Yohanna Talopp observe l’organisation et les activités de l’Oxford Brookes Student Union (OBSU), qu’elle décrit comme un ‘syndicat étudiant moderne et actif’. Ensuite, elle situe ce cas local dans le cadre national en analysant le rôle et la trajectoire du National Union of Students (NUS). La représentation étudiante au Royaume-Uni s’incarne dans une seule organisation fédérative. La plupart des universités ont un syndicat (student union) dont la grande majorité est affiliée au NUS. Aujourd’hui, l’organisation représente plus de 3,5 millions d’étudiants y compris dans l’éducation post-secondaire. Les étudiants deviennent automatiquement membres du syndicat et reçoivent une carte d’adhérent. En plus de ses observations de l’intérieur, Talopp a utilisé diverses sources : publications ; revue de presse ; documents syndicaux ; entretiens avec des représentants de l’OBSU et des étudiants ‘ordinaires’.

Ce travail est divisé en trois parties. La première partie constitue une toile de fond de l’enseignement supérieur et de la vie étudiante au Royaume-Uni. Talopp souligne quelques transformations récentes qui ressemblent à bien des égards au cas de la France : l’expansion rapide de l’enseignement supérieur ; l’hétérogenéité croissante de la population étudiante ; l’apparition de l’étudiant en tant que ‘consommateur’. La transition d’un système autrefois réservé à une élite à l’université de masse suscite de vifs débats.  L’université reste-t-elle un privilège ou est-elle devenue un droit ?  L’égalité des chances est-elle actuellement garantie ?  L’objectif actuel fixé par le gouvernement est d’amener 50% des jeunes âgés de 18 à 30 ans au niveau de l’enseignement supérieur avant 2010. Aujourd’hui, le Royaume-Uni compte déjà presque 2 millions d’étudiants et un jeune sur trois s’inscrit à l’université. Cette politique d’expansion s’accompagne d’une tranformation du financement des études.  En 1998, le système des bourses a été abandonné et les frais de scolarité introduits (tuition fees).  Parmi les propositions plus récentes, on trouve l’introduction des frais de scolarité variables selon le prestige des disciplines et institutions (top-up fees) et un impôt destiné aux licenciés (graduate tax).

Talopp décrit l’histoire, le rôle et le fonctionnement de l’OBSU, qui se donne comme objectif ‘l’enrichissement de l’expérience étudiante en offrant représentation, services sociaux et facilités de divertissement ainsi que la possiblité de s’épanouir à l’intérieur du syndicat, l’université et la communauté locale’. Les quatorze représentants du syndicat sont élus chaque mois de mars. Ils forment un Comité Exécutif dont le fonctionnement est coordonné par un président. Parmi les tâches spécifiques des représentants sont la gestion des services (recherche de logement et d’emplois, restauration, magasins et bars) et la promotion des intérêts de certains groupes (femmes, minorités ethniques et étudiants étrangers par exemple). De plus, les étudiants peuvent exprimer leurs intérêts académiques dans le syndicat par l’intermédiaire de représentants élus dans chaque discipline.

Aussi, les 66 clubs et sociétés à Oxford Brookes sont affiliés au syndicat, qui assure leur financement. Ceux-là comprennent des activités sportives, politiques, religieuses, charitables, culturelles et artistiques.  En outre, le syndicat mène des actions locales au nom des étudiants (en 2001 par exemple, l’OBSU a lancé une campagne contre la réorganisation de l’année académique en semestres) et soutient les campagnes nationales du NUS.

La deuxième partie présente une trajectoire historique de la représentation et participation étudiantes au Royaume-UniTalopp cite la formation de la première Student Representative Council (SRC) à l’Université d’Edimbourg en 1884 comme la ‘source du mouvement étudiant en Grande Bretagne’.  Si le modèle du SRC s’est étendu à d’autres universités, aucune organisation à vocation nationale n’a vu le jour avant 1922 avec la création officielle du NUS.  Initialement, l’organisation a promu des voyages étudiants et a mené des études sur les thèmes de la santé des étudiants et de leurs perspectives professionnelles.  Autour des années quarante, le NUS a assumé une position plus politique.  Le Congrès National Annuel de 1942 a adopté une résolution de ‘trouver une réponse au fascisme et poser les fondations d’un monde plus juste et paisible’.  Talopp ne fait pas référence aux mouvements de protestation des années soixante (qui d’ailleurs n’ont jamais été aussi radicaux qu’en France).  Elle cite néanmoins qu’ à l’époque le NUS était ‘un outil, un moteur et une organisation pour les aspirations politiques du mouvement étudiant’.  Les campagnes de la décennie suivante ont porté sur l’autonomie des syndicats et la question des bourses.  En 1976, les frais de scolarité ont été abandonnés grâce aux efforts de  l’organisation.  En même temps, le NUS s’est heurté à une crise financière qui est devenue plus grave après l’élection de Margaret Thatcher en 1979.  Depuis, l’organisation a dû faire preuve de plus de dynamisme en matière financière.

Dans la troisième partie, Talopp demande dans quelle mesure les étudiants ‘ordinaires’ participent aux activités de l’OBSU et du  NUS. Ses conclusions semblent comparables au cas des universités françaises : les étudiants à Oxford Brookes méconnaissent ou bien se méfient du syndicat, qui est considéré comme un appareil ‘politique’, bureaucratique et peu représentatif.  Pour diverses raisons, très peu d’étudiants sont membres d’un club ou d’une société. Ils s’intéressent peu à la structure et au travail de l’OBSU tout en bénéficiant de ses services sociaux et récréatifs.  Au niveau national, la majorité des étudiants n’ont pas participé à la campagne pour la réintroduction des bourses.  Même si les bourses ont été rétablies en Ecosse et au Pays de Galles, la plupart des étudiants auront des dettes lourdes en quittant l’université.  Selon Talopp, ‘les vingt dernières années ont vu un déclin de la participation étudiante et le retour de l’apathie’.  Malheureusement, elle ne cherche pas à examiner les causes de cette apathie.  Finalement, l’étude analyse les divers conflits qui ont lieu, soit entre le gouvernment et le NUS, les syndicats locaux et le NUS, ou bien les syndicaux locaux et l’administration des universités.

Ce travail constitue un outil précieux pour comprendre la représentation étudiante au Royaume-Uni.  Talopp ouvre de nombreuses perspectives pour de futures études qui dépassent les limites de cette maîtrise.  Comme en France peut-être, le monde des étudiants est un champ de recherche qui reste largement à découvrir.

Le site internet du NUS se trouve à www.nusonline.co.uk Pour des informations sur l’Université d’ Oxford Brookes voir www.brookes.ac.uk

Suzanne Saito

Les Cahiers du GERME trimestriel – N° 22-23-24 – 2°-3° et 4° trimestres 2002

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