Voter ou non aux élections étudiantes : intérêts et limites d’une enquête par questionnaire localisée

urneNotre Ami Tristan Haute, de l’Université de Picardie Jules Verne (CURAPP-ESS/CERAPS) avec ses étudiants d’Amiens, ont réalisé une petite enquête sur la participation politique des étudiants. En attendant leurs notes de recherche, dont certaines portent sur le rapport des étudiants au mouvement des gilets jaunes, aux marches pour le climat ou au mouvement contre la réforme des retraites, qui paraîtront dans Les Cahiers du Germe en 2021, voici les extraits d’une note rédigée concernant le vote étudiant. L’intégralité, avec les tableaux, paraîtra dans les prochains Cahiers.

Le vote aux élections organisées dans l’enseignement supérieur pour élire des représentants étudiants dans les instances des universités ou des CROUS (Centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires) est une pratique de participation minoritaire, presque marginale. La mobilisation lors de ces scrutins est en effet historiquement faible depuis leur instauration par la loi dite Faure en 1968. Une seule exception est la participation enregistrée en 1969 (52 %) (Boussard, 1974), au lendemain de la loi Faure et des événements de mai-juin 1968 qui l’avait suscitée, et cela malgré l’appel au boycott de la majorité de l’Unef (Union nationale des étudiants de France), syndicat alors hégémonique, au nom du « refus de la cogestion de l’université bourgeoise » (Morder, 2020a, p. 55). Dans les années 1970, la participation aux élections des conseils des unités d’enseignement et de recherche (UER) ne dépasse pas les 25 % (Boussard, 1974 ; 1980). De même, pour les conseils des universités, élus au suffrage direct à partir de 1984, la participation n’a jamais dépassées 20 % au niveau national : 17,27 % en 1984 (Côme, Morder, 2009, p. 17), 13,9 % en 2002-2003 (Kunian, 2004, p. 33), 13,76 % en 2011-2012 et 12,31 % en 2013-2014 (Haute, 2020, p. 85). Enfin, la participation aux élections dans les CROUS est comprise entre 5 % et 10 % depuis les années 1980 (Le Bart, 2001, p. 364 ; Stuppia, Haute, à paraître).

Si l’abstention aux élections étudiantes fait souvent l’objet de commentaires médiatiques et militants, elle n’a suscité que très peu de recherches scientifiques. Et pour cause, les matériaux disponibles sont très parcellaires. D’une part, les résultats des élections dans les universités et dans les CROUS ne sont pas centralisés et sont très rarement disponibles à une échelle très fine. D’autre part, les enquêtes « Conditions de vie des étudiants » menées par l’Observatoire de la vie étudiante (OVE), si elles interrogent les étudiants sur leur adhésion syndicale ou sur l’éventuel exercice de fonctions électives, ne pose pas la question de la participation aux élections étudiantes (Thoury, 2016).

Les rares travaux relatifs à l’abstention en milieu étudiant font toutefois état de conclusions convergentes. Tout d’abord, son caractère massif s’expliquerait moins par une « dépolitisation » des étudiants (Morder, 2020b, p. 137) ou par un rejet d’un mode de représentation électif que par une absence d’enjeu saillant, aux yeux des étudiants, et par une faible capacité des organisations étudiantes et des candidats à susciter la participation de leurs camarades (Stuppia, Haute, à paraître). Ces travaux soulignent également que, bien que massive, l’abstention étudiante n’en apparaît pas moins comme fortement dépendante de la filière d’étude. Ainsi la participation aux élections étudiantes est plus importante en santé et en sciences qu’en droit et surtout en lettres et sciences humaines (Haute, 2020). Ces inégalités de participation selon la filière s’expliquent par deux phénomènes. D’une part, la participation électorale étudiante est en réalité surtout liée au sentiment d’intégration dans la filière (Le Bart, Merle, 1997). Or, ce sentiment d’intégration varie très fortement entre les différentes filières de l’enseignement supérieur : alors que certaines filières, notamment les plus prestigieuses, suscitent et entretiennent ce sentiment, d’autres filières constituent un « moratoire » aux yeux des étudiants qui les fréquentent de manière toujours passagères (ibid. ; Morder, 2020b, p. 138). D’autre part, les filières sont associées à des offres électorales très différentes. La question n’est pas tant celle de la « concurrence » que celle du degré d’implantation d’associations corporatives ou, dans une moindre mesure, de militants syndicaux qui incitent leurs camarades à la participation (Boussard, 1980, p. 89 ; Stuppia, Haute, à paraître).

Nous proposons de contribuer à ces recherches en analysant les résultats d’une enquête par questionnaire menée par les étudiants de la licence 2 de science politique de l’Université de Picardie Jules Verne. Cette enquête a été menée du 22 octobre au 1er novembre auprès d’un échantillon de 413 étudiants de la même université. La passation s’est déroulée en ligne, par téléphone ou en face-à-face. Le contexte sanitaire n’a pas facilité le recours à cette dernière modalité d’enquête et a pu impacter les résultats de l’enquête du fait de la plus difficile « intégration » des étudiants dans la vie universitaire dans une période marquée par l’alternance, depuis mars 2020, entre distanciel et présentiel restreint. Bien que très diversifié, l’échantillon n’est en rien « représentatif » des étudiants de l’université, au sens statistique. Plusieurs biais ont ainsi été observés. Les étudiants de droit, d’économie-gestion et, dans une moindre mesure, de science politique sont nettement surreprésentés (36,3 % des répondants contre 13,1 % des étudiants de l’UPJV) alors que les étudiants en sciences et technologies sont sous-représentés (12,3 % des répondants contre 28,9 % des étudiants de l’université). De même, les étudiants en master et, dans une moindre mesure, en première année de licence et de DUT sont sous-représentés dans l’échantillon. Pour autant, les étudiants boursiers sont à l’inverse plutôt bien représentés. (45 % des répondants contre 40 % des étudiants de l’UPJV en 2012, Dekneudt, Bonduaeux, 2012).

La question suivante était posée aux enquêtés : « Avez-vous déjà voté à une élection étudiante ? ». 40,7 % d’entre eux ont répondu « oui », un taux qui peut paraître élevé, alors même que les élections aux conseils de l’université, reportées pour cause de crise sanitaire, n’avaient pas encore eu lieu au moment de l’enquête. On peut dès lors se demander si certains répondants, au-delà du risque d’incompréhension de la question, ont considéré l’ensemble des pratiques électives existantes dans le monde étudiant (élection d’un bureau des étudiants, élection de délégués de promotion…) et non les seules pratiques formalisées et institutionnalisées (vote à l’urne pour des instances officielles). 20,1 % ont répondu qu’ils se sont abstenus et 39,2 % ont répondu que, à leur connaissance, aucune élection étudiante n’avait eu lieu.

Malgré ces limites, il est donc possible de croiser la participation électorale des étudiants (vote, abstention ou non connaissance/non confrontation à un scrutin) avec la filière d’appartenance des étudiants, avec leurs caractéristiques sociales mais aussi avec leur rapport à la politique. Au-delà des analyses bivariées, un modèle de régression multinomiale, non reproduit ici, a été réalisé avec, en variable dépendante, le vote à un scrutin étudiant et, en variables indépendantes, le genre, le secteur de formation, le niveau d’étude, le type de logement, le groupe socioprofessionnel d’appartenance des deux parents, l’intérêt pour la politique, la fréquence des discussions politiques entre amis et l’adhésion, passée ou actuelle, à une association étudiante, à un syndicat étudiant ou à un parti politique.

Deux résultats apparaissent particulièrement saillants. En premier lieu, la non confrontation à un scrutin apparaît autant liée à une faible intégration dans l’université (étudiants en L1 n’appartenant à aucune organisation collective) qu’à un rapport à la politique très distant, voire inexistant (étudiants pas du tout intéressés par la politique et ne parlant jamais de politique avec leurs amis). En second lieu, le fait de voter apparaît également dépendant du rapport à la politique et de l’intégration dans une vie étudiante, et notamment de l’engagement ou non dans une association mais aussi du milieu social d’origine.

I. La non confrontation à un scrutin : un rapport distant à l’université… et à la politique

Une analyse du profil des répondants qui affirment ne pas avoir voté car aucune élection n’a eu lieu à leur connaissance fait assez logiquement apparaître qu’il s’agit d’étudiants qui sont plus récemment arrivés à l’université. Ainsi 52,1 % des répondants en première année de licence ou de DUT déclarent ne pas avoir été confrontés à un scrutin étudiant. Cette proportion chute progressivement quand on avance dans le cursus pour atteindre 20 % parmi les étudiants en master 2.

L’implication dans des organisations collectives (association étudiante, syndicat étudiant ou parti politique) apparaît également comme une variable discriminante. Certes, l’adhésion à un syndicat ou à un parti politique sont des pratiques minoritaires : 3,4 % des répondants sont membres d’un syndicat étudiant et 6,3 % l’ont été par le passé tandis que 4,6 % des répondants sont membres d’un parti politique et 4,4 % l’ont été par le passé. Mais l’adhésion à une association étudiante est bien plus répandue : 20,2 % des répondants en sont actuellement membres et 10,1 % l’ont été par le passé. Or, les étudiants qui sont ou ont été membres d’une association étudiante, d’un syndicat étudiant ou d’un parti sont significativement moins nombreux à affirmer ne pas avoir été confrontés à un scrutin. Ainsi, seuls 26,2 % des membres actuels d’une association et 11,9 % des anciens membres déclarent ne jamais avoir voté faute de scrutin contre 47 % des répondants n’ayant jamais adhéré à une association étudiante. L’effet d’ancienneté mis en évidence plus haut explique sans doute que les anciens adhérents déclarent encore plus avoir été confrontés à un scrutin que les adhérents actuels. L’importance des engagements étudiants, y compris associatifs, montre à quel point la pratique électorale étudiante est d’autant plus accessible que les étudiants sont déjà impliqués dans la vie étudiante, rappelant ici le rôle du « sentiment d’intégration » identifié par Christian Le Bart et Pierre Merle (1997).

Enfin, la non confrontation à un scrutin étudiant apparaît aussi lié à un rapport distant à la politique. Ainsi plus les étudiants se déclarent intéressés par la politique, moins ils déclarent ne pas avoir été confrontés à une élection étudiante : 59,3 % des étudiants déclarant ne pas être du tout intéressés par la politique déclarent aussi ne pas avoir voté faute d’élection étudiante contre 20,7 % des étudiants qui déclarent être beaucoup intéressés par la politique (voir tableau 3). La relation apparaît aussi robuste qu’en matière d’implication dans la vie de l’université. Ainsi, un faible intérêt ou une absence d’intérêt pour la politique peut conduire à une autoexclusion des procédures électives étudiantes. Mais, au-delà de l’intérêt pour la politique, le poids des discussions politiques rappelle aussi l’importance des interactions sociales en matière de mobilisation électorale. En effet, 68,8 % des répondants qui ne discutent jamais de politique avec leurs amis indiquent ne pas avoir voté faute d’élection contre 39,2 % de l’ensemble des répondants.

On peut dès lors affirmer que le fait de ne pas avoir voté faute de scrutin à sa connaissance est certes le résultat d’une faible ancienneté, qui prive mécaniquement certains étudiants de possibilités de participation électorale, mais aussi le fruit de la conjonction d’une absence d’investissement dans la vie étudiante, notamment associative, et d’un rapport distant, voire inexistant, à la politique qui se matérialise par une absence d’intérêt pour la politique et de discussions politiques entre amis.

II. Les déterminants pluriels de la participation électorale étudiante

Si on s’intéresse à présent aux répondants qui déclarent avoir déjà été confrontés à un scrutin on constate qu’une majorité d’entre eux déclarent avoir voté à au moins un scrutin (66,9 %), preuve sans doute de l’intermittence de la pratique électorale en milieu étudiant, à l’image de ce qui est observé dans le champ politique (Braconnier et al., 2017).

Dans la continuité de nos résultats en matière de non confrontation à un scrutin, le rapport à l’université et à la politique apparaissent déterminants. Ainsi parmi les répondants confrontés à un scrutin, seuls 60,5 % de ceux qui n’ont jamais été membres d’une association y ont voté contre 74,2 % de ceux qui en sont actuellement membres et 81,1 % de ceux qui l’ont été par le passé. De même, toujours parmi les répondants confrontés à un scrutin, ceux qui ne sont pas du tout intéressés par la politique ne sont que 45,8 % à y avoir voté contre 66,9 % de l’ensemble des répondants. On notera toutefois que c’est moins le degré d’intérêt pour la politique que la présence, même marginale, d’un tel intérêt qui apparaît déterminant. Enfin, ce n’est pas dans les filières où le niveau d’intérêt pour la politique est le plus élevé, comme la science politique, l’économie ou le droit (Michon, 2008), que la participation électorale est la plus importante.

Si la conjonction d’un intérêt, même minimal, pour la politique et d’un engagement, notamment associatif, dans la vie de l’université constitue une situation particulièrement propice à la participation électorale, nos données font aussi apparaître que la pratique électorale est socialement située. Certes, on n’observe pas de différence significative de participation, ou même de confrontation à un scrutin, entre les étudiantes et les étudiants, alors même que les premières sont significativement moins engagées dans les syndicats étudiants et exercent significativement moins de fonctions électives, en dépit de la parité instaurée dans la plupart des instances universitaires (Thoury, 2016). Mais, la participation électorale n’est pas exactement la même selon le groupe socioprofessionnel d’appartenance des parents. Si les écarts sont parfois faibles, et difficilement lisibles, le modèle de régression réalisé, mais non reproduits ici, fait apparaître que, à rapport à l’université et à la politique égal, les répondants confrontés à un scrutin dont le père est cadre ont significativement plus de chances d’avoir participé à un scrutin que l’ensemble des répondants (74,5 % contre 66,9 %). Une relation inverse est observée pour les répondants dont la mère n’a jamais exercé d’activité professionnelle, preuve que certains milieux sociaux sont plus propices au développement de prédispositions au vote.

Un autre résultat apparaît instructif en matière de participation : la plus grande propension des étudiants logés dans une résidence étudiante du CROUS à participer. En effet, parmi les répondants confrontés à un scrutin, 79,3 % de ceux en logement CROUS ont déjà voté à une élection étudiante contre 66,9 % de l’ensemble des répondants. Deux pistes explicatives peuvent être avancées. D’une part, pour ces étudiants, les enjeux des élections étudiantes, notamment dans les CROUS, peuvent paraître plus saillants puisqu’ils sont en contact quotidien avec l’institution. D’autre part, ces étudiants, parce qu’ils se concentrent dans un même endroit, sont aussi davantage la cible des stratégies de mobilisation déployées par les organisations étudiantes et par les candidats en période électorale, ce qui renvoie à l’importance des interactions sociales comme facteur de mobilisation électorale.

Pour terminer, la filière d’étude ne semble pas, en termes de participation ou de confrontation à un scrutin, être une variable déterminante. La seule différence conséquente concerne la moindre confrontation des étudiants de santé et de STAPS à un scrutin : 49,4 % n’ont pas voté faute d’élection organisée à leur connaissance contre 39,2 % de l’ensemble des répondants. Mais cette différence disparaît quand on tient compte du rapport différencié à la politique et à l’université des répondants. Ce résultat contradictoire avec ceux obtenus au niveau agrégé (Haute, 2020) peut s’expliquer soit par la taille réduite des échantillons pour chaque filière, soit par des biais d’échantillonnage (voir supra).

On constate toutefois que les deux principales variables identifiées, à savoir l’intérêt pour la politique et l’adhésion à une association étudiante, n’ont pas un rôle déterminant quelle que soit la filière d’étude. En effet, l’absence d’intérêt pour la politique apparaît déterminant d’une exclusion massive de la pratique électorale pour les étudiants des secteurs  « droit, économie, gestion » et « arts, lettres, langues, sciences humaines et sociales » : les étudiants de ces deux secteurs pas du tout intéressés par la politique sont respectivement 27,3 % et 15,8 % à avoir voté lors d’une élection étudiante contre respectivement 46,8 % et 56 % des étudiants de ces deux secteurs beaucoup intéressés par la politique. Le constat est encore plus flagrant parmi les étudiants du secteur « santé et sports » : plus ils sont intéressés par la politique, plus ils ont déjà voté à une élection étudiante. Mais, pour les étudiants du secteur « sciences et technologies », l’intérêt pour la politique ne semble pas être une variable déterminante : en effet, les étudiants de ce secteur beaucoup (50 %) et assez (20 %) intéressés par la politique ont moins voté à une élection étudiante que les étudiants qui sont seulement un peu intéressés par la politique (52,2 %). S’agissant de l’engagement associatif, celui-ci est déterminant quelle que soit la filière d’étude, même si sont poids apparaît moindre dans le secteur « droit, économie, gestion » où seuls les anciens adhérents sont significativement plus participants électoralement que le reste des répondants. À l’opposé, en sciences et technologies, où l’intérêt pour la politique n’est pas une variable déterminante, l’adhésion associative est le principale moteur de la participation électorale : deux tiers des adhérents ou anciens adhérents ont déjà voté à une élection étudiante contre moins d’un quart (23,3 %) de ceux qui n’ont jamais été adhérents d’une association étudiante (tableau 10). On peut donc conclure que, si il n’y a pas d’effet filière direct, les déterminants pluriels de la participation électorale étudiante varient en fonction du contexte d’étude.

Conclusion

Une analyse de la participation aux élections étudiantes au niveau individuel, malgré les limites de l’enquête mobilisée, permet de mettre au jour les déterminants pluriels de la participation que recouvre souvent artificiellement un « effet filière ». D’une part, la conjonction d’un investissement faible, voire nul, dans la vie étudiante, notamment associative, et d’une absence d’intérêt pour la politique semble éloigner les étudiants des urnes. D’autre part, si notre enquête ne posait pas la question du « sentiment d’intégration » dans la filière et dans l’université, force est de constater que l’intégration objective dans celle-ci, qu’il s’agisse d’appartenir à une association étudiante ou même de loger dans une résidence étudiante, semble favoriser la participation électorale des étudiants. À ce titre, et même si la participation apparaît comme une pratique située socialement, le poids des interactions sociales apparaît déterminant comme l’illustre la relation entre la confrontation à un scrutin et l’existence, même rare, de discussions politiques entre amis. Comme le souligne Frédéric Lebaron, ce sont ces influences, celles des amis ou des candidats, « plus ou moins diffuses, qui  » activent  » de façon variable la norme civique dans des contextes précis ; le fait de voter dépend ainsi avant tout de l’état de l’organisation collective du groupe […] et de la mobilisation de celui-ci » (Lebaron, 2012, p. 103).

Le recours croissant au vote électronique lors des élections étudiantes, qui s’est particulièrement accéléré en raison du contexte de crise sanitaire, pourrait modifier l’équilibre entre ces déterminants pluriels. En effet, si la participation ne semble pas avoir significativement diminué lors du passage au vote en ligne, descendant rarement au-dessous des 10 %, on peut se demander si un vote par Internet et non plus physique, a fortiori en période de confinement où les interactions sociales entre étudiants sont plus que réduites, n’a pas engendré une démobilisation électorale des étudiants appartenant à des filières où le sentiment d’intégration est davantage répandu et où des organisations corporatives mobilisent plus massivement les étudiants et, au contraire, la remobilisation d’étudiants qui, quoique moins intégrés dans leur filière, ont un rapport moins distant à la politique. Se pose à ce titre la question de la capacité des organisations étudiantes à transposer en ligne des stratégies de mobilisation électorale qui, jusqu’ici, étaient principalement déployées hors ligne (distributions de tracts, interventions dans les cours, porte-à-porte dans les résidences universitaires…).

Tristan Haute, Université de Picardie Jules Verne, CURAPP-ESS/CERAPS

Bibliographie

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