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Congrès de Grenoble, 25 avril 1946, commission de la vie matérielle de l’étudiant, le texte de la déclaration soumis à la discussion

DECLARATION DES DROITS ET DEVOIRS DE L’ETUDIANT (adopté par le 35° Congrès de l’UNEF réuni à Grenoble le 25 avril 1946)

Les représentants des étudiants français, légalement réunis en Congrès National à Grenoble, le 24 avril 1946, conscients de la valeur historique de l’époque

Où l’Union Française élabore la nouvelle déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen ;

Où s’édifie le Statut pacifique des Nations ;

Où le monde du travail et de la jeunesse dégage les bases d’une révolution économique et sociale au service de l’Homme ;

Affirment leur volonté de participer à l’effort unanime de reconstruction ;

Fidèles aux buts traditionnels poursuivis par la Jeunesse Etudiante lorsqu’elle était à la plus haute conscience de sa mission,

Fidèles à l’exemple des meilleurs d’entre eux, morts dans la lutte du peuple français pour sa liberté,

Constatant le caractère périmé des institutions qui les régissent,

Déclarent vouloir se placer, comme ils l’ont fait si souvent au cours de notre histoire, à l’avant-garde de la jeunesse française, en définissant librement, comme bases de leurs tâches et de leurs revendications les principes suivants :

Article premier. – L’étudiant est un jeune travailleur intellectuel.

Droits et devoirs de l’étudiant en tant que jeune :

Art. II. – En tant que jeune l’Etudiant a droit à une prévoyance sociale particulière dans les domaines physique, intellectuel et moral.

Art III. – En tant que jeune, l’Etudiant a le devoir de s’intégrer à l’ensemble de la Jeunesse Nationale et Mondiale.

Droits et devoirs de l’étudiant en tant que travailleur :

Art. IV. – En tant que travailleur l’Etudiant a droit au travail et au repos dans les meilleures conditions et dans l’indépendance matérielle, tant personnelle que sociale, garantie par le libre exercice des droits syndicaux.

Art. V. – En tant que travailleur, l’Etudiant a le devoir d’acquérir la meilleure compétence technique.

Droits et devoirs de l’étudiant en tant qu’intellectuel :

Art VI. – En tant qu’intellectuel, l’Etudiant a droit à la recherche de la vérité et à la liberté qui en est la condition première.

Art. VII. En tant qu’intellectuel, l’Etudiant à le devoir :

– de chercher, de propager et défendre la vérité, ce qui implique le devoir de faire partager et progresser la culture et de dégager le sens de l’histoire ;

– de défendre la liberté contre toute oppression, ce qui, pour l’intellectuel, est la mission la plus sacrée.

Cette déclaration constitue désormais la Charte de l’Etudiant et sera placée en préambule aux statuts de l’U.N. et à ceux de toutes les A.G.

Dès lors, les A.G. et l’U.N.E.F. décideront de remplir une double mission:

– Tout entreprendre pour faire aboutir toutes revendications entrant dans le cadre des droits définis ci-dessus.

– Tout faire pour aider les étudiants dans l’accomplissement des tâches auxquels ils sont astreints par la présente déclaration.

Il s’agit :

1° – D’admettre que chaque année l’ordre du jour du Congrès National des Associations Générales des Etudiants de France doit comporter nécessairement l’étude d’un programme d’action, adapté à la situation concrète.

  1. a) Ce programme d’action devra nécessairement définir la politique générale de l’U.N.E.F. tant sur le plan national qu’international, pour l’année à venir, c’est à dire, déterminer les principales revendications étudiantes à présenter aux pouvoirs publics, les moyens d’action propres à les faire aboutir, et fixer les tâches les plus urgentes à accomplir par l’ensemble des étudiants, tant dans le cadre des A.G. et de l’U.N. que dans celui de la nouvelle Union Internationale des Etudiants.
  2. b) Ce programme d’action devra nécessairement s’inspirer de la déclaration énoncée plus haut. En aucun cas, il ne pourra contenir l’énoncé d’une revendication, la mise en oeuvre d’une tâche ou d’un moyen d’action, susceptibles de violer la lettre ou l’esprit de ladite déclaration.
  3. c) Ce programme d’action est élaboré par la Commission numéro 1 de l’U.N.E.F.
  4. d) Après examen, il est voté conformément aux dispositions prévues dans les statuts de l’U.N.E.F. par l’Assemblée Générale.
  5. e) Le bureau de l’U.N.E.F. est chargé d’exécuter, pendant l’année à venir, ce programme d’action. S’il y a lieu, il peut l’adapter aux circonstances nouvelles qui peuvent survenir, sans jamais cependant avoir le droit de prendre des décisions susceptibles de violer l’esprit et la lettre de ladite déclaration.
  6. f) Le bureau de l’U.N.E.F. est responsable devant le Comité de l’U.N.E.F. de l’exécution de ce programme d’action, comme aussi de toutes modifications qu’il a été obligé de lui apporter en raison des circonstances.

Il s’agit :

De définir dès aujourd’hui les moyens d’action que les A.G. et l’U.N. peuvent mettre en oeuvre pour réaliser leur programme d’action. C’est pourquoi l’U.N.E.F. au cours de ce Congrès, a fait adopter par toutes les A.G. les moyens d’action énumérés ci-dessous et admis par l’Association Générale des Etudiants Lyonnais.

  1. a) Pétitions et Lettre ouvertes
  2. b) Manifestations d’ensemble
  3. c) Monômes spectaculaires
  4. d) Monômes revendicateurs
  5. e) Grèves d’abstention
  6. f) Grèves d’occupation
  7. g) Monômes dévastateurs.

Il est bien évident que les A.G. ne pourront recourir aux grèves d’occupation ou aux monômes dévastateurs que si les conditions suivantes se trouvent réunies :

– Violation très grave de la déclaration des droits et devoirs de l’étudiant.

– Reconnaissance de la gravité de cette violation par l’ensemble des étudiants et des travailleurs.

– Certitude d’avoir l’assentiment populaire.

– Accord de l’U.N.E.F.

Dans le cas où ces quatre conditions seraient réunies, le Bureau de l’U.N.E.F. peut décider d’étendre la grève ou les monômes dévastateurs à l’ensemble des Universités de France.

Enfin, si non seulement les droits de l’Etudiant, mais encore les droits essentiels du Citoyen venaient à être violés, participation à l’insurrection populaire nationale.

Il s’agit :

D’obtenir que les mouvements confessionnels ou politiques ou politiques adhérents à l’U.P.O.E. ou à une organisation analogue, tout en continuant à se situer sur le plan qui leur est propre, trouvent pour leurs légitimes aspirations syndicales, un cadre d’expression et de réalisation au sein des A.G. et de l’U.N.

C’est pourquoi nous proposons que les A.G. et l’U.N.E.F. prennent l’habitude de convoquer régulièrement l’U.P.O.E.

Au cours de ces rencontres qui doivent être prévues statutairement, les A.G. sur le plan local, l’U.N.E.F. sur le plan national :

– Mettent au courant les différents organismes adhérant à l’U.P.O.E. de leur programme d’action.

– S’informent auprès d’eux des différents besoins du monde étudiant.

– Et dans la mesure du possible, obtiennent d’eux une participation effective à toutes actions entreprises par les A.G. et l’U.N. relevant de la déclaration des droits et devoirs de l’étudiant.

– Il s’agit :

D’élargir les A.G. par la base. C’est pourquoi nous proposons que:

  1. a) les étudiants n’aient qu’un vote à accomplir au cours de l’année, celui destiné à élire les délégués étudiants des sections de chaque faculté ou école (ce qui équivaut à la suppression du décret Capitant) ;
  2. b) au cours de ce vote, tous les étudiants sont électeurs, ne peuvent faire acte de candidature que les étudiants inscrits à l’A.G.

N.B. Un projet technique élaboré par la Commission précise les modalités d’application de se système.

Il s’agit :

– D’obtenir que les délégués étudiants ainsi élus aient un rôle pleinement délibératif partout où ils auront à siéger. C’est pourquoi nous proposons que l’U.N.E.F. à l’issue de ce congrès, présente au Ministère de l’Education Nationale les revendications suivantes :

  1. a) les délégués étudiants des sections d’Ecoles ou Facultés participent aux travaux du Conseil de Faculté ou d’Ecole avec voix délibérative.
  2. b) Les délégués du bureau de l’A.G. font partie, de plein droit, du Conseil de l’Université ou de tous autres Conseils, Comités d’administration qui en dépendent et assistent avec voix délibérative, à toutes les réunions desdits conseils ou comités.
  3. c) Avant de prendre toutes décisions concernant les étudiants, le Ministre de l’Education Nationale convoque et consulte le Bureau de l’U.N.E.F.

Le Bureau de l’U.N.E.F. doit appartenir, de droit, à la Commission Nationale de la Réforme de l’Enseignement avec voix délibérative.

ECONOMIE DES FORCES SUR LE PLAN SOCIAL ET CULTUREL

Il s’agit :

I°) d’assurer la continuité et la stabilité des services sociaux et culturels des A.G.

2°) de dégager les étudiants du souci matériel que comportent ces services en leur laissant le contrôle de leur gestion.

C’est pourquoi nous proposons que les A.G. adoptent cette année le projet qui avait été présenté l’année dernière au Congrès de Dax par M. ROSIER, à savoir:

Les services sociaux et culturels des A.G. sont pris en charge par un comité mixte, constitué comme suit :

– Un délégué de l’Université, désigné par le Recteur ;

– Deux délégués (professeurs ou personnalités de la ville), anciens membres de l’A.G. et révocables par elle; ces délégués sont choisis par le Comité de l’A.G.

– Trois délégués de l’A.G. élus par le comité.

 

 

 

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